Pour un chef d’entreprise, les périodes de difficultés économiques sont synonymes de stress, et recourir au licenciement peut paraître compliqué. En effet, le régime du licenciement pour motif économique est difficile à appréhender, d’autant qu’il semble évoluer aussi vite que votre entreprise ! LegaLife a donc fait le point, pour vous proposer ce guide complet du licenciement économique.

Le licenciement économique à jour de la loi travail

La loi travail du 8 aout 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social, et à la sécurisation du parcours professionnel, mieux connue sous le nom de loi El Kohmri, a fait débat en politique comme dans l’opinion publique. Elle vise notamment à mieux encadrer le licenciement économique, dont le régime, déjà modifié par la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, nécessitait des éclaircissements.

La jurisprudence se chargeait jusqu’ici de préciser les modalités de recours au licenciement pour motif économique, mais le législateur a choisi de codifier ces règles, pour une meilleure sécurité juridique. Ainsi, les modifications apportées par la loi travail, en vigueur au 1er décembre 2016, doivent donc être prises en compte pour mieux comprendre le régime du licenciement économique.

Mais alors, comment licencier un salarié pour motif économique ?

Les motifs de licenciement économique

Le contrat de travail, qu’il s’agisse d’un contrat à durée indéterminée (CDI) ou d’un contrat à durée déterminée (CDD), ne peut être rompu dans n’importe quelles conditions par l’employeur. Vous devez en effet procéder à un licenciement pour cause réelle et sérieuse, par exemple à un licenciement pour faute du salarié. Le chef d’entreprise peut ainsi se séparer d’un employé en raison de sa situation économique, c’est-à-dire pour une cause indépendante de la personne du salarié.

L’article L. 1233-3 du Code du travail donne une définition du licenciement économique et fixe les cas dans lesquels il est autorisé. Au terme de cette définition légale, il s’agit du licenciement justifié par un ou des motifs non inhérents à la personne du salarié. Il peut ainsi résulter d’une suppression ou d’un transformation de son emploi, ou d’une modification d’un élément essentiel du contrat de travail que le salarié aurait refusée. L’impact effectif de ces événements sur l’emploi doit alors être apprécié au niveau de l’entreprise, ou du secteur commun d’activité dans un groupe.

Le texte donne ensuite des exemples de motifs économiques, sans que cette liste soit exhaustive, ce qui signifie que les juges pourraient en admettre d’autres.

Le licenciement économique pour difficultés économiques

En premier lieu, le licenciement peut être motivé par des difficultés rencontrées par l’entreprise. La loi travail introduit une définition légale de cette notion. Il s’agit de difficultés caractérisées par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique, ou par tout autre élément de nature à les justifier.

Le nouveau texte donne alors une liste d’exemples d’indicateurs économiques :

  • Une baisse des commandes ou du chiffre d’affaire, caractérisée comme significative par rapport à la même période sur l’année précédente à partir de :
    • 1 trimestre dans les entreprises de moins de 11 salariés,
    • 2 trimestres consécutifs dans les entreprises de 11 à 49 salariés,
    • 3 trimestres consécutifs dans les entreprises de 50 à 299 salariés,
    • 4 trimestres consécutifs dans les entreprises de 300 salariés et plus.
  • Des pertes d’exploitation.
  • Une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation.

Le licenciement économique pour mutations technologiques

Il s’agit là de l’introduction dans votre entreprise de nouvelles technologies nécessaires à votre activité. Les mutations technologiques qui peuvent justifier un licenciement sont donc celles qui ont une incidence sur le poste du salarié concerné. L’informatisation de l’entreprise peut ainsi constituer un motif de licenciement économique, mais le changement doit être suffisamment important pour que vous n’ayez pas d’autre choix que de vous séparer de votre salarié. Il doit en outre s’agir d’une évolution que vous n’auriez pas pu prévoir de manière à former votre personnel.

Dans ces conditions, et dans le respect de l’obligation de reclassement, les mutations technologiques peuvent constituer une cause autonome de licenciement, même lorsqu’elles ne mettent pas en cause la compétitivité de l’entreprise.

Le licenciement économique pour réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité

Introduit par la jurisprudence avant d’être codifié par la loi travail, ce motif de licenciement couvre les cas dans lesquels vous êtes obligé de procéder à une réorganisation interne, sauf à mettre en péril la survie de votre entreprise. La réalité de ce risque et son caractère inéluctable sont strictement contrôlés par les juges. En effet, il s’agit d’une forme de licenciement préventif qui peut vite tourner à l’abus. La nécessité de cette mesure doit donc être établie de façon objective, et prouvée par des faits matériels : baisse du carnet de commande, diminution du chiffre d’affaire,… Il n’est pas nécessaire cependant d’établir des difficultés actuelles, puisqu’il s’agit de prendre des mesures pour éviter un risque futur.

Le licenciement économique pour cessation de l’activité

Issu de la jurisprudence, ce motif de licenciement est également introduit dans le Code par la loi travail de 2016. La fermeture totale et définitive de l’entreprise justifie donc un licenciement. Elle ne doit pas toutefois découler d’une faute de l’employeur. Vous pouvez ainsi par exemple licencier un salarié si vous fermez votre entreprise pour partir à la retraite ou car vous êtes gravement malade.

Le cas particulier du licenciement économique avant un transfert d’entreprise

En cas de reprise de l’activité d’une entreprise par un nouvel employeur, le droit prévoit le transfert du contrat de travail des salariés. Il intervient de plein droit avec une simple notification du transfert du contrat de travail par le nouvel employeur. Les licenciements économiques intervenant dans la période précédant cette reprise étaient traditionnellement invalidés, comme effectués par collusion frauduleuse entre les employeurs. En effet, le repreneur peut préférer ne pas garder l’ensemble du personnel.

La nouveauté de la loi travail de 2016 est d’autoriser le licenciement économique précédant un transfert d’entreprise. Cette possibilité est toutefois encadrée par de strictes conditions :

  • Soit l’entreprise est de dimension communautaire et emploie au moins 1 000 salariés, soit elle appartient à un groupe de dimension commentaire ou qui emploie au moins 1 000 salariés.
  • Les licenciements s’inscrivent dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).
  • Ce PSE prévoit le transfert d’une ou de plusieurs entités économiques.
  • Ce transfert permet d’éviter la fermeture d’un ou de plusieurs établissements.
  • L’employeur initial souhaite accepter l’offre de reprise qui lui est faite.

La procédure de licenciement économique

Quel que soit le motif invoqué, l’employeur qui procède à un licenciement économique est tenu de suivre une procédure spécifique. Elle dépasse la procédure de licenciement classique, applicable quelles que soient les circonstances. A défaut, le licenciement pris en violation de cette procédure peut être remis en cause devant le Conseil des Prud’hommes.

  • En premier lieu, l’employeur doit établir un ordre de licenciement fondé sur des critères objectifs. Ces critères peuvent être fixés par la convention collective applicable. A défaut, il le fait lui-même après consultation des instances représentatives du personnel. A l’exclusion de la discrimination, il peut s’agir de l’ancienneté, des charge de famille, des compétences professionnelles,…
  • Il doit ensuite faire au salarié des propositions de reclassement ou d’adaptation qui lui permettraient de conserver un emploi.
  • Sans succès, il doit alors adresser au salarié une convocation pour un licenciement. Cette convocation contient les motifs du licenciement et la possibilité de s’y faire assister.
  • L’entretien préalable se tient au plus tôt 5 jours après la convocation et permet d’aborder les raisons du licenciement. Les possibilités de reclassement peuvent être abordées à cette occasion.
  • Si le projet est confirmé, l’employeur peut alors faire parvenir au salarié une lettre de notification de licenciement qui annonce officiellement sa décision. Elle ne peut intervenir que 15 jours ouvrables après l’entretien pour les cadres, ou 7 jours pour les autres salariés. Dans tous les cas, elle mentionne la priorité de réembauche prévue à l’article L. 1233-45 du Code du travail.

Pour le reste, la procédure diffère légèrement en fonction de la situation.

Quoi qu’il en soit, le salarié licencié pour motif économique bénéficie d’un préavis. Consultez notre guide sur le sujet : Fin du contrat de travail : tout sur le préavis. Une indemnité spécifique doit en outre lui être versée. Il doit enfin recevoir les documents remis au salarié lors de son départ, quelles qu’en soient les circonstances. Ces documents de fin de contrat sont le reçu pour solde de tout compte, l’attestation Pôle emploi, et le certificat de travail.

Le licenciement économique individuel

Lorsqu’un chef d’entreprise se trouve confronté à une situation justifiant un licenciement économique, il peut suffire de se séparer d’un seul salarié. La marche à suivre n’est pas tout à fait la même que pour un licenciement collectif.

  • Le salarié doit  être informé de la possibilité d’un contrat de sécurisation professionnelle.
  • L’employeur doit après la notification du licenciement procéder à l’information de l’administration. Il envoie alors une déclaration en ce sens à la DIRECCTE sous 8 jours.

Le licenciement économique collectif

Lorsqu’un chef d’entreprise doit licencier entre 2 et 9 salariés sur une période de moins de 30 jours, on parle de licenciement collectif. Certaines règles particulières s’appliquent.

  • L’employeur doit en premier lieu réunir et conseiller les instances représentatives du personnel. Il s’agit des délégués du personnel dans les entreprises de moins de 50 salariés. Lorsqu’il y a au moins 50 salariés, c’est le comité d’entreprise qui doit être consulté.
  • Une fois le licenciement notifié, il a une obligation d’information de l’administration sous 8 jours.

Le licenciement économique dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE)

Si plus de 10 salariés sont licenciés pour motif économique sur une période de 30 jours, on parle de grand licenciement collectif. Des dispositions particulières s’appliquent.

  • Les obligations relatives à l’information et à la consultation des représentants du personnel sont renforcées.
  • L’obligation d’entretien préalable individuel est levée si l’entreprise comporte des institutions représentatives du personnel.
  • Il faut établir un plan de sauvegarde (article L. 1233-61 du Code du travail) dans les entreprises qui emploient plus de 50 salariés. Il pour but de limiter les départs et de faciliter le reclassement. Dans les entreprises de moins de 50 salariés, en l’absence de PSE, l’administration doit être informée et consultée tout au long de la procédure.
  • Le projet de licenciement collectif doit faire l’objet d’une information de l’administration. Dans les entreprises de 50 salariés au moins, les licenciements doivent être homologués ou validés par la DIRECCTE.
  • La notification des licenciements ne peut intervenir dans un délai inférieur à 30 jours après cette information.

Le licenciement économique pour liquidation judiciaire

L’entreprise en  liquidation judiciaire fait face à des difficultés telles que son activité prend fin en justice. En état de cessation des paiements, elle ne peut plus faire l’objet d’un redressement. Ainsi, la cessation de l’activité est inévitable, et les contrat de travail sont nécessairement rompus. Une procédure simplifie doit être suivie. Le juge désigne un liquidateur qui prend en charge les démarches liées au personnel, avec consultation des représentants.

Textes de référence

Les modalités légales du licenciement économique sont prévues aux articles L. 1233-1 et suivants du Code du travail.

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A propos de l'auteur

Margaux

Etudiante en droit des affaires à l'Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, je suis notamment en charge de la rédaction et de la mise à jour de nos guides juridiques

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1 commentaire

  • Bonsoir,
    Pensez vous mettre à jour votre article à la suite des ordonnances du 22 septembre 2017 ?
    Bien cordialement.