Transversale et protéiforme, la notion d’intuitu personae irrigue les relations juridiques entre individus dans l’ensemble des branches du droit. Elle a trouvé un écho particulier en droit des sociétés, le contrat de société étant celui liant plusieurs individus dans l’objectif de réaliser un objet commun.
Table des matières
Qu’est-ce que l’intuitu personae ?
De son origine latine qui signifie « en fonction de la personne », l’intuitu personae n’a rien perdu de son sens d’origine. En effet, il met en lumière le lien invisible qui unit deux ou plusieurs personnes entre elles.
Quand on dit qu’un contrat est conclu intuitu personae, cela signifie que les parties s’accordent sur des obligations au regard de la personne du cocontractant. Le contrat est alors conclu avec cette personne-là, et pas une autre. La justification de l’existence de ce contrat est donc à rechercher en la personnalité de l’autre partie. Il s’agit ainsi de ses qualités personnelles, ses compétences professionnelles, sa réputation, son talent…
Appliqué au droit des sociétés, l’intuitu personae implique que des associés se regroupent au sein d’une société en considération de la personnalité de celle-ci. L’impact de la notion se retrouve principalement au moment de la création ou de l’entrée dans la structure. Elle ne concerne que quelques formes sociales, celles où l’affectio societatis, la confiance et la responsabilité sont les plus développés.
Quelle est la place de l’intuitu personae dans la société ?
Intuitu personae et choix de l’associé
Intuitu personae et sociétés de personnes
La présence de l’intuitu personae en droit des sociétés est à rechercher du côté des sociétés de personnes. Les associés y sont responsables personnellement et indéfiniment des pertes que pourrait subir la structure. La personnalité de l’associé est donc essentielle. En effet, il est possible d’actionner son patrimoine ou de solliciter son expertise en cas de difficultés financières.
L’intensité de l’intuitu personae est fonction la nature de la société de personnes.
Dans les sociétés à visée professionnelle que sont les sociétés civiles professionnelles (SCP) et les sociétés d’exercice libéral (SEL), l’intuitu personae est essentiel. Il va en effet guider la réussite et le développement de la structure. Ce sont alors les qualités du futur associé qui sont étudiées plus que sa fortune. C’est la raison pour laquelle SCP et SEL sont de grandes consommatrices d’apports en industrie.
Dans les autres sociétés de personnes où la responsabilité des associés est illimitée, l’intuitu personae est l’un des éléments de sélection à l’entrée.
L’importance donnée aux associés en tant qu’individus se traduit dans les SNC par l’exigence d’unanimité dans la prise de décision.
Dans la SCI, l’intuitu personae est le concept même de la société. En effet, elle est composée d’un faible nombre de personnes qui sont des proches. Il s’agit souvent de membres d’une même famille, de couples, d’amis,…
Intuitu personae et SARL
Dans les SARL, la situation est hybride. L’intuitu personae est plus atténué, mais demeure un facteur pris en compte lors de l’arrivée d’un nouvel associé dans la structure. En effet, l’intérêt porté à la personne de l’associé s’explique par le nombre limité de membres. La loi conditionne ainsi l’existence de la SARL à un maximum de 100 associés.
Intuitu personae et sociétés par actions
En revanche, dans les sociétés par actions, l’intuitu personae est très faible. En effet, les actionnaires souhaitent plus investir leur argent que participer véritablement à l’aventure sociale. Leur entrée dans la société se fait donc quasiment systématiquement par le biais d’un apport en numéraire. Le capital investi leur donne alors droit à une certaine fraction de dividendes à la fin de chaque exercice bénéficiaire.
L’absence de responsabilité supérieure au montant de l’apport effectué rend indifférente la personnalité des actionnaires tant aux yeux des tiers qu’aux yeux de la personne morale.
Toujours est-il que des traces d’intuitu personae demeurent dans le fonctionnement des sociétés par actions. En témoigne la stipulation dans les statuts de clauses d’agrément destinées à encadrer l’entrée des nouveaux membres.
Intuitu personae et intransmissibilité des droits sociaux
Comme pour le choix de l’associé, l’intuitu personae sépare les sociétés par actions des sociétés de personnes en matière de transmission de titres sociaux. En effet, les sociétés par actions sont marquées par une très grande fluidité des cessions qui peuvent en principe intervenir librement.
A l’inverse, dans les sociétés de personnes, les parts sociales sont rattachées à leur propriétaire. Une cession signifie donc le départ d’un associé à la personnalité et aux compétences spécifiques, et l’arrivée d’un nouvel associé inconnu et possiblement sans valeur pour l’activité sociale.
De plus, les associés qui ont fait un apport en industrie disposent de parts d’industrie qui ne leur confèrent pas une fraction du capital social. Ces droits sont par essence intransmissibles. Les parts ne peuvent ni être vendues, ni faire l’objet d’une donation, ni être données en héritage… Cela pour la simple et bonne raison qu’elles ont été attribuées à l’aune des qualités et du savoir-faire de la personne qui les détient.
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